L’étreinte des Flammes :
« — Ce petit bijou est l’un de mes mélanges préférés, reprit la mère d’Izzy en saisissant un nouveau flacon. Effets bénéfiques assurés sur la vie amoureuse, garantie satisfait ou remboursé. Votre mari n’a jamais eu de… faiblesse ?
Elle leva un doigt qu’elle laissa ensuite pendre mollement tout en haussant les sourcils.
Un silence assourdissant se fit soudain à l’étage.
— Euh… non.
J’essayai de me retenir. Vraiment. Si Darryl n’avait pas dit « Bien joué, mon pote, pendant un moment, je me suis fait du souci pour toi », je pense que j’aurais tenu. Mais il le dit. Et Adam éclata de rire, ce qui vint à bout de mes dernières résistances.
Je poussai un soupir et arrachai une peluche imaginaire de mon pantalon.
— Il n’a jamais de faiblesse de ce genre. Mon mari est un loup-garou, vous savez. Il n’a vraiment pas de problème de ce côté-là, si vous voyez ce que je veux dire.
Elle cligna des yeux d’un air avide.
— Non, je ne vois pas. Que voulez-vous dire ?
— Eh bien…, marmonnai-je en détournant les yeux, comme si j’étais gênée. Vous savez ce qu’on dit sur les loups-garous.
Elle se pencha plus près de moi.
— Non, je ne sais pas, murmura-t-elle. Dites-moi.
J’avais entendu la porte de la salle de réunion s’ouvrir, aussi avais-je la certitude que les loups-garous en haut ne manquaient rien de notre conversation, même si nous chuchotions.
Je soupirai et reposai les yeux sur elle.
— Disons que… tous les soirs, ça me va. Tous les matins aussi. Mais trois ou quatre fois dans la même nuit ? (Je laissai échapper un rire rauque.) Vous avez vu mon mari, non ? (Adam était d’une beauté à couper le souffle.) Mais parfois… Je n’ai plus vingt ans, vous comprenez ? Il m’arrive d’être fatiguée. Alors que je ne rêve que de dormir, il vient encore se frotter contre moi, enfin, vous voyez, quoi. (Je lui adressai ce qui ressemblait, je l’espérais, à un sourire timide teinté d’une pointe d’optimisme.) Vous n’auriez rien susceptible de m’aider ?
Je ne sais pas à quoi je m’attendais au juste, mais certainement pas à ce qui se passa ensuite.
Avec un hochement de tête entendu, elle sortit de la boîte une fiole de bonne taille étiquetée « Doux Repos ».
[…]
Après l’avoir raccompagnée à la sortie et avoir fermé la porte derrière elle, je m’adossai au battant. Adam se racla la gorge. Lorsque je levai le regard, je le découvris au milieu de l’escalier. Appuyé contre le mur, les bras croisés, il faisait de son mieux pour paraître fâché, mais une petite ride d’amusement au coin de ses yeux le trahissait.
— Alors comme ça, je t’en demande trop, déclara-t-il en secouant la tête. Tu aurais dû m’en parler. J’ai beau être ton mari, tu as le droit de dire non.
Je pris une mine effarée.
— Je ne voulais pas te blesser.
— Je viens me frotter contre toi, hein ? (Il afficha un air songeur.) Maintenant que j’y pense, j’ai une subite envie qui monte.
— Maintenant ? soufflai-je sur un ton horrifié avant de lever les yeux vers la chambre de Jesse. Pense aux filles.
Il inclina la tête comme pour tendre l’oreille avant d’affirmer :
— Elles n’entendront rien, de là-haut.
Sur ces mots, il se mit à descendre lentement les marches.
— Pense à Darryl, Zack, Lucia et Joel, répliquai-je avec sérieux. Ils seront traumatisés à vie.
— Tu sais ce qu’on dit sur les loups-garous, rétorqua-t-il avec gravité en arrivant au pied de l’escalier.
Je détalai, et il se lança à mes trousses.
Alors que je contournais l’imposante table de la salle à manger, il prit appui dessus d’une main et la franchit d’un bond, passant juste au-dessus de la tête de Médée qui piquait un roupillon en territoire interdit. Son feulement de protestation demeura sans effet sur Adam. Je plongeai sous la table et émergeai de l’autre côté avant de traverser la cuisine au pas de course et de dévaler l’escalier, riant si fort que je peinais à respirer.
Il me rattrapa dans la salle de jeux et me fit tomber d’un croche-pied avant de me plaquer au sol. Après quoi il m’embrassa sur le menton, dans le cou, sur la joue et sur l’arête du nez pour finalement s’arrêter sur mes lèvres. Ses baisers avaient totalement chassé notre petit jeu de mon esprit – en même temps que la capacité à formuler une pensée cohérente –, aussi me fallut-il une seconde ou deux pour comprendre ce dont il parlait lorsqu’il dit « frotte-frotte ». »
L’étreinte des flammes
Mercy Thompson – Tome 9
Patricia Briggs